MACRO - A la poursuite du "scenario parfait" en 2024?

25/01/2024
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En 2023, la pression monétaire des principales banques centrales s’est accrue. La Réserve Fédérale américaine a procédé à 4 hausses de taux de 25 pbs, pour un relèvement total depuis 2022 de 525 pbs. En Europe, la BCE a augmenté ses taux de 200 pb cette année (+450 pbs depuis 2022). Ces durcissements monétaires ont poussé les rendements obligataires à des sommets pluriannuels. En octobre, la dette française à 10 ans s’échangeait à plus de 3.50%, un point haut depuis 2011. Au même moment, les bons du trésor américain atteignaient 5%, au plus haut depuis 2007. Ces conditions financières restrictives ont naturellement pesé sur le marché des actions.

Mais depuis la mi-octobre, changement de régime sur les marchés. Les rendements obligataires se sont effondrés de plus de 1%. A fin 2023, retour du 10 ans français autour de 2.50% et le 10 ans américain à 3.90%.  Ce recul des rendements a très largement profité aux marchés actions qui ont progressé depuis la mi-octobre d’environ 15% (+13% pour l’Euro Stoxx 50 et +16% pour le S&P 500). Ce rebond a permis aux principales bourses d’afficher des hausses de 20 à 25% sur l’année.

Qu’est ce qui explique cette situation ? Pourquoi les rendements se sont-ils si fortement affaissés ? 
La réponse se trouve dans les anticipations des marchés pour l’année 2024. Les investisseurs envisagent désormais un renversement brutal des politiques monétaires. Pour la Fed et la BCE, les marchés anticipent désormais des baisses de taux monétaire de l’ordre de 150 pbs pour cette année. La justification de ce pari réside dans la certitude que la bataille contre l’inflation est gagnée. Par rapport aux niveaux stratosphériques atteints en 2022 (9.2% aux USA et 10.6% en zone euro), les derniers chiffres sont effectivement bien plus raisonnables (3.1% aux USA et 2.9% en zone euro). L’optimisme des investisseurs est également renforcé par la conviction que les principales zones économiques vont éviter une récession en 2024 et vont bénéficier des allégements monétaires anticipés.

Cette vision optimiste des marchés nous semble être un pari assez audacieux. Certes l’inflation a nettement reculé au cours des derniers mois mais l’inflation « cœur », c’est-à-dire retranchée des éléments les plus volatils comme l’énergie, reste, elle, trop élevée : 4.0% aux Etats-Unis et 3.4% en zone Euro. Cette inflation « cœur » est notamment alimentée par la consommation des ménages qui profitent d’un marché de l’emploi dont la solidité ne se dément pas. Nous ne sommes donc pas complétements convaincus d’un rapide et franc relâchement des conditions monétaires.

Le risque de récession est très élevé
Selon nous, le risque de récession est très élevé particulièrement pour l’Europe. En 2021 et 2022, les ménages ont pu absorber l’inflation grâce à l’épargne accumulée pendant le Covid mais celle-ci a été consommée. Dans la plupart des pays (Chine et Europe notamment), après les plans massifs de soutien, les marges budgétaires sont aujourd’hui quasi-nulles et c’est la rigueur qui prévaut désormais. Seule exception, les Etats-Unis, avec une économie qui continue de surprendre, profitant largement des milliards du plan Biden, l’Inflation Reduction Act. Mais là aussi, nous arrivons aux limites de l’exercice en matière budgétaire.

Pour rajouter un peu plus de prudence, dans un contexte géopolitique déjà très tendu, on notera que 2024 sera une année électorale dans de nombreux pays avec des implications potentiellement importantes (Taïwan, Etats-Unis notamment).