Impôts des retraités : l'abattement fiscal de 10% sur le point de disparaître ?

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Le gouvernement Bayrou envisage de remplacer l’abattement fiscal de 10 % sur les pensions de retraite par une déduction forfaitaire de 2 000 € par personne. Derrière cette réforme annoncée comme plus équitable, se cachent des perdants… nombreux.

Une réforme qui inquiète les retraités
Annoncée dans le cadre du plan d’économies de 40 milliards d’euros du gouvernement Bayrou, la suppression de l’abattement fiscal de 10 % sur les pensions, en vigueur depuis 1978, fait débat. À partir de 2026, cette déduction proportionnelle aux revenus serait remplacée par un abattement forfaitaire de 2 000 euros par retraité, soit potentiellement 4 000 euros pour un couple. Une mesure de "justice sociale", selon le ministre des Finances Éric Lombard, qui défend un recentrage des avantages fiscaux vers les retraités modestes et de classe moyenne.
 

Mais comme souvent en fiscalité, le diable est dans les détails. Aujourd’hui, l’abattement de 10 % est plafonné à 4 399 euros par foyer fiscal. Ainsi, un couple percevant 50 000 euros de pensions pouvait en déduire ce montant maximal. Demain, avec la réforme, cette réduction tomberait à 4 000 euros, soit une perte sèche de 399 euros, sans compter les effets de seuil sur l’impôt dû.
 

Ce changement paraît minime, mais il masque des disparités importantes selon les situations familiales. Un retraité veuf ou seul, percevant par exemple 25 000 euros annuels, bénéficie actuellement d’un abattement de 2 500 euros. Avec la réforme, il ne pourra déduire que 2 000 euros, soit une hausse de 12,5 % de son impôt. Et plus les revenus augmentent, plus l’effet est pénalisant.

Une mesure technique, mais à fort impact politique
Selon les simulations de l’Observatoire Français des Conjonctures Économiques (OFCE), 40 % des ménages retraités seraient perdants avec ce nouveau dispositif. Environ 10 % en sortiraient gagnants, essentiellement les couples dans lesquels un seul membre est retraité, et 50 % ne seraient pas concernés, car non imposables. L’effet redistributif annoncé serait donc limité, et la mesure se traduirait surtout par 800 millions d’euros de recettes fiscales supplémentaires pour l’État.
 

Un autre point d’interrogation réside dans la situation des retraités ayant une demi-part supplémentaire, comme les veuves d’anciens combattants ou les invalides. Le gouvernement a indiqué que l’abattement serait par part fiscale, mais n’a pas précisé s’il serait proportionnel pour les demi-parts. Pour ces publics, le manque de clarté ajoute à l’inquiétude.
 

Par ailleurs, les retraités percevant des rentes viagères à titre gratuit – par exemple issues d’une donation ou succession – pourraient aussi être impactés, puisque ces revenus entrent dans le calcul global des pensions soumis à l’abattement. Pour certains foyers disposant de patrimoines importants mais de revenus modestes, cela pourrait entraîner une hausse sensible de la fiscalité.
 

Cette réforme, bien que technique, risque donc de devenir hautement politique, d’autant plus que la majorité au Parlement est incertaine. Il n’est pas garanti que la mesure soit adoptée telle quelle dans la loi de finances 2026. En attendant, les retraités doivent anticiper l’impact potentiel sur leur déclaration.